27 janvier 2013



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Nous sommes en 1919. Un bateau quitte l'Empire du Levant avec à son bord plusieurs dizaines de jeunes femmes promises à des Japonais travaillant aux États-Unis, toutes mariées par procuration. 
C'est après une éprouvante traversée de l'Océan pacifique qu'elles rencontrent pour la première fois à San Francisco leurs futurs maris. Celui pour lequel elles ont tout abandonné. Celui auquel elles ont tant rêvé. Celui qui va tant les décevoir.
À la façon d'un chœur antique, leurs voix se lèvent et racontent leurs misérables vies d'exilées... leurs nuits de noces, souvent brutales, leurs rudes journées de travail dans les champs, leurs combats pour apprivoiser une langue inconnue, la 
naissance de leurs enfants, l'humiliation des Blancs... Une véritable clameur jusqu'au silence de la guerre et la détention dans les camps d' internement – l'État considère tout Japonais vivant en Amérique comme traître. Bientôt, l'oubli emporte tout, comme si elles, leurs époux et leurs progénitures n'avaient jamais existé.
Ce roman raconte la destinée misérable des émigrées : la plupart du temps, leurs maris sont en fait des paysans pauvres qui les dépucellent brutalement dès le premier soir, la vie se résume aux travaux des champs ou à la domesticité, et l’hostilité des Américains « de souche » se manifeste insidieusement jusqu’à exploser lors de la guerre, quand les immigrés japonais sont regardés comme des ennemis de l’intérieur. L’injustice s’ajoute alors à la souffrance et aux humiliations, aggravant la dimension tragique de cette aventure. 'Certaines n’avaient jamais vu la mer' est un livre puissant, poétique, brillant. Une véritable réussite.

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